Véritable traqueur d’astéroïdes, Michel Ory, astronome amateur en Suisse, en a découvert pas moins de 200 astéroïdes mais aussi la comète 304P/Ory.
Je vous propose d’en savoir plus sur cette activité pas comme les autres.
L’astéroïde Bennu a reçu récemment la visite de la sonde OSIRIS-REx. Crédit photo : JPL/NASA
AB : Vous êtes, comme l’évoque le titre de votre livre, chasseur d’astéroïdes. Comment vous est venue cette idée de dénicher de nouveaux corps célestes ?
MO : J’ai participé de 1993 à 1997 à construire de mes mains l’Observatoire astronomique jurassien à Vicques en Suisse. Nous y avons installé en 1998 un télescope de 60 cm qui avait à la fois des problèmes optiques et électroniques. Impossible de l’utiliser. Pour résoudre ces problèmes, j’ai fait la tournée des instruments équivalents en France et en Suisse et c’est à ce moment-là que je me suis rendu compte que des amateurs découvraient des astéroïdes. Une fois l’instrument de Vicques réparé, dès 2000, je me suis mis à chasser l’astéroïde. Depuis 2011, je les chasse depuis le Maroc à l’Observatoire de l’Oukaimeden.
AB : Quel matériel utilisez-vous pour vos recherches ?
MO : De 2000 à 2011, le T600 de Vicques et une caméra CCD. Depuis 2011, le T500 du projet MOSS (Morocco Oukaimeden Sky Survey) que j’ai réalisé avec la française Claudine Rinner.
L’observatoire de Jura. Crédit photo : http://www.jura-observatory.ch
AB : Est-il difficile de découvrir des astéroïdes ?
MO : En 2000, quand j’ai commencé non, maintenant, c’est beaucoup plus difficile. D’une part car les gros surveys américains vont plus haut en magnitude (21-22 au lieu de 19-20 à l’époque), d’autre part car la réglementation de découverte de l’UAI a changé en octobre 2010, au profit des gros surveys et au désavantage des chercheurs amateurs.
AB : Quel temps consacrez-vous à cette activité ?
MO : Avec MOSS, j’observe trois nuits par semaine, sauf en cas de mauvais temps et de Pleine Lune. En gros j’y passe 8 heures par semaine.
AB : Vous n’avez pas seulement découvert des astéroïdes, mais aussi des comètes et des supernovæ ?
MO : Oui, j’ai découvert plus de 200 astéroïdes à Vicques (d’autre arriveront découverts plus tard au Maroc), 2 supernovæ extragalactiques à Vicques (en 2003 et 2006) et 2 comètes (une à Vicques, 304P/Ory, l’autre au Maroc, C/2013 V5 (Oukaimeden), l’une des deux comètes les plus brillantes en 2014). Par ailleurs, j’ai découvert quatre astéroïdes géocroiseurs (un à Vicques, trois au Maroc).
La comète C/2013 V5 Oukaimeden imagée par l’astronome amateur Damian Peach. Source photo : http://www.damianpeach.com/c2013v5.htm
AB : Que vous manque-t-il à votre tableau de chasse ?
MO : Un astéroïde Centaure ou une comète à longue période (typiquement 30 ans).
AB : Quelle a été votre plus belle découverte ? Pourquoi ?
MO : Assurément la comète qui porte mon nom. Elle m’a amené en orbite durant une semaine. A l’école (je suis enseignant), j’ai parlé comètes à toutes mes classes durant une semaine. Je pensais comète, je rêvais comète et je parlais comète…
AB : Dans votre livre, vous semblez inquiet de la place prépondérante que prennent les programmes de détections automatiques. Est-ce que cela signifie que les astronomes amateurs ne pourront plus rien découvrir ?
MO : En matière d’astéroïdes, je pense que la source pour les amateurs se tarit. Rare sont les amateurs à encore rechercher des astéroïdes dans le monde. Avec le programme MOSS et Claudine Rinner, on est un peu les derniers à se battre contre les gros surveys.
AB : Comment se passe la confirmation d’une nouvelle découverte d’un astéroïde ?
La réglementation de l’UAI a changé en octobre 2010. Maintenant, plus nécessaire de confirmer un astéroïdes (hors comètes et géocroiseurs). La grosse majorité de nos nouvelles détections ont déjà été observées dans le passé à des oppositions précédentes.
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